jeudi 31 janvier 2019

Fin de vie, un témoignage parmi des milliers


Un témoignage sur la fin de vie rédigé par la fille d'une adhérente qui vient de décéder :

Elle était hospitalisée chez moi et a été suivie par la Croix Rouge pendant les trois dernières semaines. Quinze jours plus tôt, elle avait appris qu'aucune thérapie n'était plus possible et qu'elle allait mourir. Les personnes de la Croix Rouge ont fait un travail remarquable : très à l'écoute et respectueux de ma mère, très présents afin de lui apporter tout le "confort" possible.
Cependant, un matin, 6 jours avant son décès, ma mère a retiré le tube d'oxygène et a déclaré que "cela ne valait plus le coup" : elle ne pouvait plus bouger de son lit, ne pouvait plus descendre sur un fauteuil regarder les oiseaux s'ébattre dehors, dormait beaucoup, avait de plus en plus de mal à communiquer, était obligée alors qu'elle n'était pas incontinente de se laisser aller dans sa "protection". Si elle ne souffrait pas vraiment physiquement, moralement, c'était effectivement une grande atteinte à sa dignité.
Évidemment, notre médecin traitant qui était devenu le sien depuis un mois seulement et le personnel de la Croix Rouge ont expliqué n'avoir pas le droit de lui faire une piqûre pour qu'elle parte. Mais au-delà du droit, il était clair que cela les choquait en tant que soignants. Ils ont tout mis en œuvre pour qu'elle ne "souffre" pas, qu'elle ne soit pas trop angoissée. Les deux derniers jours, ma mère semblait à peine consciente.
6 jours cela parait peu mais une nuit, elle m'a sifflé d'une voix à peine audible ce que je crois bien être : "c'est long". Et effectivement, même pour moi, même alors qu'elle ne semblait pas souffrir, je trouvais cela insupportable. J'en étais arrivée à souhaiter sa mort pour que ça s'arrête.
Ces six jours m'ont profondément ébranlée. Je me suis sentie totalement impuissante. J'ignore aujourd'hui encore si dans un cas comme celui de ma mère un suicide assisté est la solution.
Je vous livre tout cela car ma mère était une fervente défenseure de votre association et j'ignore encore si, pour elle, le droit à mourir dans la dignité voulait dire la faire mourir six jours plus tôt. Je me doute que chaque cas est unique mais pendant ces six jours j'ai eu le sentiment de trahir ma mère en toute impuissance. Pourtant il n'y a eu aucun acharnement thérapeutique.
Je ne suis pas prête à reprendre son flambeau, comme vous le voyez je me pose plein de questions, notamment sur ce que je ne veux pas imposer à mes enfants mais sachez que je reste très attentive aux valeurs que vous défendez.

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